Pinel, chronique dyonisienne

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Le foyer Pinel cristallise dans les esprits des Dionysiens tout un imaginaire. Qualifié de village africain, de centre culturel local, d’espace de combats militants, mais aussi de poche d’insalubrité, ce plus grand foyer de travailleurs migrants de France, construit en 1966, reste en mémoire comme le résidu d’une époque passée. Celle, entamée dès les années 1950, où l’Etat ouvre des logements à destination d’immigrés appelés, depuis ses anciennes colonies, à travailler dans les nombreuses industries françaises implantées alors en Seine-Saint-Denis. Dénoncé par le député Henri Cuq comme une zone de non droit à la fin des années 1990, Pinel est un des premiers foyers à être démoli, dans un virage politique qui signe la fin du logement spécifique pour les travailleurs immigrés. Avec l’arrêt de l’immigration de travail en 1974 en effet, le modèle du foyer entre en crise, et les projets de résorption se multiplient pour dissoudre cet habitat à la marge dans du logement social de droit commun. Ainsi, Pinel disparaît en 2000 et ses habitants sont relogés dans trois résidences sociales, habitat social et individuel normalisé, de 2003 à 2014. La dernière, construite en lieu et place de l’ancien foyer, rue Pinel, a été voulue comme une opération exemplaire pour l’entreprise gestionnaire, Adoma. Nous y avons rencontré ses habitants, dionysiens parfois depuis 30 ans, pour la plupart citoyens français. Nous comprenons alors, avec eux, que la manière de se représenter un chez-soi acceptable, survivant au foyer, entre parfois en conflit avec les contraintes qu’impose le logement type en résidence sociale.

Foyer en souvenirs, foyer en chantier

Niché à Saint-Denis (93), à la porte de Paris, le foyer Pinel s’érige, en 1966, sur les ruines d’un ancien entrepôt ferroviaire où quelques rails traînent encore. S’y concentre alors une population de plus de 1 000 hommes pour une capacité, pourtant, de 500. Equation possible par une concentration de 16 lits par chambre, et plusieurs hommes par lit. L’Assotraf (Association pour l’Aide aux Travailleurs Africains) en assure, vaille que vaille, la gestion. Comme d’autres structures patronales ou philanthropiques (Adef, Aftam, Soundiata), elle héberge des hommes venus principalement de la région de Kayes, entre le Mali, le Sénégal et la Mauritanie, recrutés en masse dans les grandes usines de métallurgie et de mécanique dont regorge alors la Seine-Saint-Denis. James Pacalet, ancien gérant du foyer à l’Assotraf, témoigne : « Les boites d’intérim venaient chercher les travailleurs au foyer, il y avait toujours du travail. »

A l’image du statut temporaire rattaché à cette main d’œuvre – les immigrés ne devant rester en France que pour le temps du travail – les foyers sont gérés à la marge, et les migrants les investissent dans l’indifférence des pouvoirs publics. Au fil des années, toute une société s’y organise dans un fonctionnement social et économique collectif. Différents services permettent de limiter les dépenses individuelles : une cuisine collective et ouverte offrant des plats à moindre coût, une salle de prière, des artisanats divers allant du coiffeur à l’épicerie, du forgeron au tailleur, des associations villageoises organisant des caisses de solidarité et des fêtes communautaires. Tout ce système est pensé pour optimiser les sommes d’argent envoyées chaque mois aux proches restés au pays, et assurer une protection sociale, ici. Nombreux sont les souvenirs qui s’arrêtent sur la solidarité qui donnait corps à cette véritable ville dans la ville qu’était Pinel. « Il y a eu une grande fête. Tous les artisans de chaque corps de métier ont été appelés, et des griots étaient venus du Mali pour l’occasion. C’était la fraternité» raconte par exemple Bathily, débarqué quelques jours avant l’inauguration du foyer, aussi baptisé « Porte de Paris ». Juliette Seydi, dionysienne d’une soixantaine d’années qui travaille aujourd’hui au cabinet du Maire, témoigne aussi qu’à Pinel, dans sa vingtaine, elle pouvait toujours trouver des cigarettes à l’unité jusqu’à 2 heures du matin, s’acheter un plat à deux euros, et retrouver « son » tailleur. Progressivement ce qui devait être temporaire s’inscrit dans le durable. Beaucoup de ces hommes acquièrent en effet la nationalité française au cours des Trente Glorieuses, où le plein emploi facilite les régularisations. Et le durable, aussi, s’inscrit dans la précarité. Ainsi, aujourd’hui soixantenaires, des anciens de Pinel content l’insalubrité et la promiscuité subies au foyer. Ils partageaient tout, leur lit comme leurs maladies, et notamment des cas d’épisodes de tuberculose.

Espace de luttes pour les droits

Dans les années 1970, des luttes pour défendre leurs droits s’organisent alors massivement, portées par des militants qui formeront, plus tard, le COPAF (COllectif Pour l’Avenir des Foyers, 1996). Geneviève Petauton, une de ses fondatrices, jadis maoïste, se rappelle des discussions anticolonialistes à bâtons rompus dans les chambres de Pinel. Depuis ce « lieu décisif de la classe ouvrière immigrée » [1] qu’est le foyer rayonnent ainsi les luttes contre les crimes racistes, pour la régularisation des résidents sans-papiers, et s’organisent des manifestations et des pétitions pour l’amélioration des conditions de vie dans foyers et les usines. Nous sommes alors en 1974, l’Etat signe l’arrêt de l’immigration de travail, et revoit ses politiques en matière de logement et de gestion des flux migratoires. Le modèle du foyer de travailleur migrant entre en crise, une crise multiple. Financière d’abord, car les opérations d’urbanismes et les fonds destinés aux migrants comme le Fond d’Action Sociale pour les Travailleurs migrants et leurs Familles (FASTIF) s’arrêtent. Politique aussi, avec la fronde des travailleurs. Et sociale, car ils sont touchés par une précarisation croissante, dans un contexte de crise économique où les entreprises licencient en priorité leur main d’œuvre immigrée.

Geneviève Petauton © Caroline Trouillet

« A Pinel on est beaucoup intervenu sur la problématique des régularisations. On luttait contre les crimes racistes aussi, avec des tracts, notre propre journal, des journées portes ouvertes dans les foyers. Et à Pinel il y avait beaucoup de fêtes. » Geneviève Petauton, militante au COPAF

 

En 1996, le rapport du parlementaire Henri Cuq entérine alors la fin des foyers, fustigeant ces zones qualifiées de « non droit ». Un an plus tard, l’Etat annonce la mise en œuvre d’un « plan de traitement des foyers » sur l’ensemble du territoire français. Dans ce contexte, le « village » Pinel fait tâche. L’Etat et la Ville de Saint-Denis décident de le démolir et d’organiser le relogement des résidents dans un habitat d’un autre type : la résidence sociale. L’Assotraf, endettée, n’a pas les reins assez solides pour assurer la transformation. C’est donc la Sonacotra (anciennement Sonacotral, puis rebaptisée Adoma en 2007), qui prend en charge l’opération, comme elle le fait au début des années 2000 pour nombre de foyers dégradés alors gérés par des associations.

Un petit détour par l’histoire de cette société éclaire sur cette politique de logement spécifique : la Sonacotral est créé en 1956 sous l’égide du ministère de l’Intérieur pour fixer les Français d’Algérie dans des foyers. Elle concentre alors une force de travail coloniale, et limite sa circulation autonome dans l’espace métropolitain. Après l’indépendance de l’Algérie, la société change de nom, devenant Sonacotra, et héberge, suivant les directives des pouvoirs publics, de nouvelles populations dont une main d’œuvre croissante en provenance des pays d’Afrique sub-saharienne, également indépendants depuis le début des années 60. Dans les années 1990, la société est finalement rétablie dans l’action publique comme un outil de lutte contre l’exclusion sociale, non plus comme un acteur spécialisé du logement des immigrés. Cette évolution guidera l’ensemble du processus de reprise en gestion du foyer Pinel, vers le logement de type « résidence sociale », neutralisant l’aspect communautaire d’antan. Car, au début des années 2000, lorsque Pinel est transformé, un virage est clair dans les politiques de logement et de gestion des flux migratoire.

De Pinel à Bachir Souni, de Bachir Souni à Pinel

Quelques 800 personnes sont recensées à Pinel, alors il ne faut pas moins de trois lieux pour leur relogement. En 2000, 200 hommes déménagent rue du Bailly, pensant rester quatre ans en transit dans un ancien bâtiment de France Telecom, avant de retrouver Pinel sous le jour d’une résidence sociale. Ils y vivront pourtant 9 ans. Entre temps, les résidences Bachir Souni et Joinville ouvrent leurs portes, en 2003 et en 2006, aux 600 autres habitants de « Porte de Paris ». Une réhabilitation globale qui aura donc mis presque 10 années à s’achever. 10 années durant lesquelles les conditions de logement pour ces hommes, dont 51 % ont entre 35 et 55 ans, sont discutées de longues heures entre les forces en place : représentants des résidents, Ville de Saint-Denis, Adoma et Etat sous l’égide de la CILPI [2]. 10 années durant lesquelles la vision politique d’un lieu de vie pour les travailleurs migrants s’est transformée. A l’échelle de notre foyer, cette évolution se mesure aux différences de conception entre la résidence sociale rue Pinel, présentée comme un modèle en 2014, et celle de Bachir Souni, ouverte 11 ans plus tôt, encore marquée par les attributs collectifs affiliés au foyer.

Boubou Soumaré, © Caroline Trouillet

« Les sans-papiers d’aujourd’hui seront peut-être les résidents de demain« , Boubou Soumaré, délégué du comité de résidents de Pinel, président de la coordination des foyers de Plaine Commune.

 

Un soir d’hiver 2016, dans sa chambre de la résidence Pinel, c’est avec regret que Boubou Soumaré évoque en effet Bachir Souni. Dans cette grande bâtisse longeant la Seine, les anciens de « Porte de Paris » peuvent vivre seul ou partager leur chambre avec un proche, se restaurer à la cuisine associative de Taff et Maffé ou au café-salle TV, se réunir dans une salle, et prier ensemble. Car, si le nouveau Pinel, avec son architecture innovante et ses chambres spacieuses, a permis de rompre un long cycle de mal-logement, elle a bien à envier aux possibilités de vie collectives de sa consœur Bachir Souni. Pour cause, seule une salle de réunion, peu aérée et trop étroite selon les résidents, est à disposition, et en dehors des chambres, les couloirs et coursives à ciel ouvert induisent davantage la possibilité de circuler que de se réunir. Geneviève Petauton explique ce différentiel : « En 1999, Jean Rebufel dirige la CILPI. Lui voulait réhabiliter le plus vite possible le plus grand nombre de foyers et les garder pour les travailleurs migrants. Rebufel a voulu quelque chose d’exemplaire et il a tout fait pour que le plan de Bachir Souni soit fait avec les délégués. Le maire de Saint-Denis Patrick Braouezec les a soutenu aussi et a demandé une cuisine collective légalisée à Bachir Souni. Et puis la Sonacotra venait de reprendre le foyer, ils n’avaient pas l’habitude donc ils avançaient doucement ». En 2001, Rebufel passe la main à Jean Pierre Rébérioux à la CILPI, lequel s’appliquera à défendre les principes de laïcité, de mixité, de non-particularisme. De concert, les politiques de gestion évoluent dans les années 2010, donnant aux négociations sur le relogement à Pinel une direction de moins en moins favorable à l’aspect collectif. « Ce n’est pas notre vocation d’accueillir du public. Notre priorité, c’est le logement » résume Christophe Ricciarelli, directeur d’unité territoriale du 93 chez Adoma, traduisant alors la position adoptée par l’Etat : les résidences sociales signent la fin d’un logement collectif pour immigrés.

Sur le terrain, la traduction de ce tournant politique prendra bien plus de temps que prévu, et sera sans cesse mise en débat par les représentants des résidents. Apprécié de ces derniers comme un homme de dialogue, salarié d’Adoma depuis 26 ans, Christophe Ricciarelli, avoue ainsi avec lassitude « Il a fallu beaucoup, beaucoup de concertation. Et je ne me suis jamais limité ». Pourtant, portée par Boubou Soumaré, la demande, à minima, d’une salle commune suffisamment grande pour accueillir tous les résidents n’a pas été prise en compte par Adoma dans le projet de réhabilitation. Juste avant le déménagement en 2014, les résidents ont alors bloqué les entrées dans la résidence en signe de protestation, pour obtenir finalement l’agrandissement de la fameuse salle, passant de 35 m2 initiaux à 52,7 m2. Cet épisode illustre bien la nature de la relation entre résidents et gestionnaires, leur négociation s’inscrivant souvent dans un rapport de force plus que de partenariat pour dessiner les conceptions réciproques d’un chez soi convenable.

« Chez soi », est-ce « chez-nous » ?

Depuis maintenant deux ans, la vie suit son cours à « Pinel 2.0 », et, dans ce quartier rénové du Grand Paris où passe désormais le tramway, les mémoires du foyer d’antan sont tapies. Ceux qui avaient connus « Porte de Paris » soufflent d’avoir un logement digne de ce nom, une intimité, une liberté de mouvement aussi pour les plus jeunes dont le quotidien est moins jaugé par les ainés. Sous la plume de Bouba Touré, les relations entre jeunes et anciens, se devinent en effet conflictuelles, au Pinel des années 1960 : « Le dimanche matin au foyer est comme les autres matins. Pas de sommeil en plus. Tout le monde se lève comme d’habitude, sauf ceux qui ont la chance d’avoir un sommeil imperturbable. C’est au tour de Madou de faire la bouffe, lui se lève plus tôt que les autres. Il doit aller acheter les poulets vivants au marché et les égorger car il faut que le riz soit prêt à midi pour que les joueurs de tiercé puissent aller faire la queue au tabac. S’ils partent avant ils ne peuvent pas être au foyer à midi. Les jeunes, eux, sortent l’après-midi, les uns vont se promener à Paris, les autres dans Saint-Denis-Pleyel, dans une maison d’accueil aménagée par la Cimade. C’est là que Banta et Souly vont chaque dimanche, ils sortent du foyer pour échapper aux éternels conseils des vieux : « Attention, ne dépensez pas votre argent, pensez au pays et au jour de votre mariage » ; ce sont les conseils qui font fuir les jeunes du foyer » [3]. Cette réalité générationnelle est souvent mobilisée, d’ailleurs, par les gestionnaires pour contrer les réticences au passage en résidence sociale : « Les résidents ont changé. Si vous discutez avec une personne de 75 ans, évidemment qu’il vous parlera des foyers à l’ancienne. Mais les jeunes demandent de la Wifi plutôt qu’une salle de prière et une salle collective », exprime ainsi Christophe Ricciarelli.

Aujourd’hui, à la résidence Pinel, les repas s’organisent seul depuis une kitchenette, ou à plusieurs dans un appartement. Certes, les délégués s’efforcent de rassurer les plus âgés dont l’angoisse de vivre seul refait parfois surface. « Récemment, un homme est décédé dans sa chambre. Personne ne le connaissait, on a mis une semaine pour comprendre qu’il était mort » s’inquiète ainsi un homme d’une soixantaine d’années, alors qu’il se projette vieillir seul dans sa chambre fermée. Pourtant aujourd’hui dans tous les projets de réhabilitation en résidence, seul le logement de type individuel, studio et T1, est rentable, et donc envisagé, pour les financeurs.

Quant aux activités d’artisanat et de commerces d’appoints, elles n’ont plus leur place. Le comité de résidents, comme Adoma, est ferme à ce sujet, et tout colporteur est éloigné, même si chacun sait qu’un habitant a improvisé une épicerie dans sa chambre, invitant les curieux avec quelques produits visibles depuis sa fenêtre. Les pratiques survivent parfois longtemps aux contraintes d’un bâtiment… S’agissant du culte encore, Boubou Soumaré refuse les prières dans la salle commune et si certains installent leur tapis en bas des escaliers, il les incite à se rendre à la mosquée du centre Tawhid, à quelques mètres de là.

En fait, les frustrations exprimées par Boubou et d’autres résidents traduisent leur exigence à pouvoir se représenter un chez-soi, aussi, en dehors de leur seul studio. Car le peu de confort de la salle commune, les désagréments techniques au quotidien, et le droit de regard du gestionnaire sur l’occupation de leur espace privé, sont perçus comme autant de signes d’une non appartenance de ce chez-soi. Et, s’il a le sourire bien facile, Boubou, les pannes d’électricité à répétition l’exaspèrent. Les menaces de manifestation devant le siège d’Adoma refont surface alors, lorsque des défaillances minent le quotidien. Sa légitimité de délégué est en jeu. Récemment aussi, il a reçu des courriers du gérant, le priant de ne plus héberger de personnes dans sa chambre. Car, si le règlement autorise un résident à accueillir une personne seulement 3 mois dans l’année, beaucoup d’habitants continuent à accueillir durablement famille ou amis en besoin. Ce courrier fait écho à la demande du gérant de pouvoir accéder aux chambres pour cause d’ « inventaire », ce que les résidents perçoivent plutôt comme une tentative de contrôle. Ce à quoi Boubou Soumaré répond « Nous sommes chez nous. J’ai changé la serrure de ma porte et fait des doubles de mes clefs. Je conseille à tous les résidents de faire de même». Ainsi, un statut d’exception entoure encore les conditions de logement des habitants, en résidence sociale, qui ne peuvent tout à fait maîtriser l’occupation de leur studio sans rendre des comptes au gérant.

Christophe Riccarelli © Caroline Trouillet

« Ce n’est pas notre vocation d’accueillir du public. Notre priorité, c’est le logement », Christophe Ricciarelli, directeur d’unité territoriale de Seine Saint Denis chez Adoma

 

Puisqu’il se conjugue parfois en chez-nous, le chez-soi se heurte ainsi au statut de résident de résidence sociale. Car elle est pensée comme un habitat pour une population en difficulté sociale, en « insertion », sous conditions de ressources. Plusieurs organismes dont le 1% patronal, la préfecture et Plaine Commune sont « réservataires » et peuvent donc placer des personnes de leur contingent lorsqu’une place se libère : « Si un résident part, il peut être remplacé par n’importe qui. Les choses vont vite, il y aura des départs naturels dans les prochaines années. On va avoir de plus en plus de femmes aussi, via notamment les demandes en ligne » explique Christophe Ricciarrelli, en référence aux 24 % des habitants âgés de plus de 60 ans à Pinel. Ces derniers mois en effet ont vu trois décès et une expulsion. Boubou Soumaré aimerait pourtant récupérer une partie de ses 4 nouvelles places pour des cousins qu’il héberge actuellement. Il est donc allé négocier avec le président de Plaine Commune, Patrick Braouezec, pour que sa part réservataire revienne aux résidents de Pinel. Et il a donné un accord de principe. « Sensible à la cause des foyers, Patrick Braouezec avait l’habitude de dire que les hommes de Pinel étaient plus dionysiens que lui-même » nous rapporte Juliette Seydi. Boubou attend pourtant avec impatience un courrier formalisant cet accord… Il sait bien que ses voisins viendront par de nouveaux biais à Pinel, mais la logique de mixité lui apparaît encore bancale, et négociable, puisque la résidence absorbe dans l’ombre déjà la précarité de plusieurs proches, sans-papiers, qui n’ont d’autres choix de logement. Ces « aventuriers » d’aujourd’hui qui ont bravé les frontières de l’Europe sont encore accueillis au foyer par l’ancienne génération des travailleurs invités. Or, ils ne peuvent pas prétendre à une place en résidence sociale. « Les sans-papiers d’aujourd’hui seront peut-être les résidents de demain » espère pourtant Boubou, alors qu’il vient de former un comité de jeunes de Pinel. Une future relève, espère-t-il encore, dans l’action de représentation et de négociation, qui a encore de longs jours devant elle.

[1] « La marche du monde est faite par les migrants et les villes », entretien de Caroline Trouillet avec Marc Bernadot sur Africultures.com : //africultures.com/php/index.php?nav=article&no=11868

[2] Commission interministérielle pour le logement des populations immigrées, créée par un arrêté du 9 juin 1998, elle a pour mission de mener des actions en faveur du logement des personnes immigrées.

[3] Ma case est à Saint-Denis, Bouba Touré, Les Xérographes

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